Entre un passé compliqué et un futur incertain, comment vivre au mieux avec soi-même ? Pour répondre à cette question, l’ouvrage explore les constructions de soi de trois types de spécialistes rituels mandingues : les donsow (les chasseurs), les basitigiw (les féticheurs) et les jinatigiw (les maîtresses des génies). Il analyse la relation entre ces spécialistes et les entités – êtres de la brousse, choses-dieux et génies urbains – que leur pratique fait émerger. Il vise à saisir, par ce biais, ce que fait le rituel, comment il le fait, et ainsi à améliorer notre compréhension de ce mode d’engagement particulier. Afin d’en appréhender le rôle dans la fabrique du religieux, le regard est porté sur la dimension matérielle de cette fabrique : ingrédients des sacrifices, couleurs des habits qui plaisent aux génies, tonalité baroque prisée par les « nouveaux entrepreneurs religieux » qui excellent dans l’usage du « faux authentique », et, surtout, sur le corps des experts, qu’ils soient à la chasse, en transe, ou engagés dans un chair à chair avec certains objets-sujets ou avec des « personnes qui ne sont pas des personnes ». Le déplacement des conditions d’intentionnalité ou d’agentivité que ces spécialistes opèrent à travers leurs pratiques leur permet-il de modifier durablement leur rapport au monde, de se constituer en des sujets « virtuoses », d’agrandir leurs marges de liberté ? Ces pratiques, qui contribuent à l’émergence de la sphère a-islamique, se constituant dès les années 1990 face aux pratiques associées à l’islam, modifient-elles les rapports de force et de genre en place dans les sociétés africaines de ce début du xxie siècle ?