Écrire un livre sur les résidents généraux de France en Tunisie, et faire apparaître l’homme à partir de sa carrière politique et administrative, ses réflexions et sa correspondance privée, revenait à rendre un devoir à ces bâtisseurs d’un système, le protectorat, montage diplomatique complexe et fragile. Le Résident général - appelé parfois Proconsul - fut le pivot central de cette dyarchie, où il fallait à la fois assurer un équilibre précaire entre un gouvernement français - souvent malhabile - et une monarchie théocratique égoïste, composer entre un peuple tunisien avide d’émancipation, des Français impatients et des minorités étrangères revendicatrices de leurs droits. Il lui fallut imaginer, entreprendre et assurer le développement technique et culturel d’un pays, pour le mettre à l’heure du XXe siècle, tout en étant attentif aux problèmes locaux qui se présentaient quotidiennement. Cette tâche, positive et civilisatrice, dut éviter certains errements qui avaient été commis dans la colonie voisine : l’Algérie. Enfin, le dépositaire du principe du protectorat, le Résident général, dut - envers et contre tous, Tunisiens comme Français - soutenir cette formule qui, par définition, était provisoire. Certes, durant ces soixante quinze années, on a parfois l’impression d’une marche en dents de scie, de tiraillements fréquents, au milieu desquels le Résident général doit continuer à administrer, à arbitrer, en abandonnant toute idéologie politique personnelle. En toute impartialité, l’auteur essaye de narrer cette entreprise avec le souci du détail et de l’insistance.