« Alors, à la terreur rouge succède la terreur blanche. Les villages brûlent, les fusillades crépitent, on tue et on massacre soi-disant à titre de représailles, mais en réalité pour assouvir les passions déchaînées. 500 prisonniers sont fusillés à Mitau, 200 à Tukkum, 125 à Dünamünde, sous la seule inculpation d'avoir été favorables à l'occupation soviétique. L'état de siège est proclamé à Riga. Tous les habitants qui détiennent des armes, tous les membres des Comités bolchéviques qui ne se présenteront pas à la police dans les quarante-huit heures, toute personne qui hébergera des réfugiés ou refusera de les dénoncer, tout individu trouvé dans la rue entre 18 heures et 6 heures du matin sans autorisation spéciale, seront punis de mort.
Ces mesures draconiennes portent à leur paroxysme la haine mutuelle des Lettons et des Baltes. Les Lettons accusent les "seigneurs étrangers" de vouloir rétablir leur dictature médiévale. Les Baltes accusent les Lettons d'être infectés du virus révolutionnaire. On assiste à des scènes d'une sauvagerie inouïe. Chaque fois que les Lettons peuvent s'emparer d'un Balte isolé, iIs le brûlent vif ou le crucifient à un arbre après lui avoir crevé les yeux. Les champs sont parsemés de cadavres nus et affreusement mutilés. Certains ont le bas-ventre arraché et leurs plaies sont remplies de pierres brûlantes. Les Baltes ripostent par des exécutions en masse. Toutes les passions accumulées au cours des siècles semblent se donner libre cours, sous un ciel ensanglanté par la lueur des incendies.»